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Aposiopesis

musique pour violoncelle

durée approximative 7 min.
comp. & première exécution 1990
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→ Video Live-Recording 2020 Frankfurt am Main, → Matthias Lorenz - vc.

Introduction


Aposiopèse veut dire la réduction au silence, le début du silence. Les doctrines de l’art de la composition au 17ième et 18ième siècle se servaient de cette figure rhétorique et musicale pour indiquer une perte, pour indiquer la mort, tandis que l’aposiopèse figurait dans la rhétorique de l’Antiquité comme le moment de silence juste avant l’argument le plus important, juste avant le point culminant du discours. Le morceau se sert de la différence entre ces deux significations et joue avec elle.

La composition reprend l’idée d’un ténor grégorien, c.-à.-d. d’un ton central sans que la clarté de celui-ci entre en fonction, elle l’entoure. La forme de la composition est caractérisée par la distance et la proximité, elle s’approche et se retire du ton central, à la fin c’est ce centre même qui change. Il y a dans le morceau ce qui s’appelle un “gestiarium”, c’est-à-dire cinq espèces de figures particulières que je développe en les variant, celles-ci reflétant les variétés possibles du son d’un violoncelle, ayant en même temps un rapport individuel avec le ténor.
C’est la première fois que j’ai travaillé avec la rotation des dimensions de la notation. La rotation figure comme un moyen pour varier un motif musical. Contrairement à la manière de Iannis Xenakis j’ai mis l’accent sur la modification du motif, qui est donc perceptible. Les modifications se superposent plusieurs fois, sont regroupées et combinées d’une manière différente.
Pour en donner une idée, je vous présente un exemple.
Il y a cinq entités musicales que j’ai notées, au-dessus on trouve une représentation graphique les caractérisant plus précisément.



De gauche à droite (la croix au centre représente le centre de rotation):
1. La ligne qui correspond au premier fa dièse désigne une certaine durée liée à une indication de la hauteur d’un ton. Si la ligne est horizontale, c’est qu‘il n’y a qu’une seule hauteur, si la ligne est inclinée, il en résulte un glissando.
2. Le point avec le petit arc indique une hauteur – au cas présent un fa – qui ne change pas et qui continue sans arrêt jusqu’à l’entité musicale suivante.
3. Le point avec le petit point staccato indique une hauteur à jouer staccato. – au cas présent un la bémol.
4. Le point avec la ligne tenuto indique une durée fixée chaque fois de nouveau, le ton ne dure pas jusqu’à l’entité musicale suivante, la hauteur est fixée, au cas présent il s’agit d‘ un si.
5. 1. La ligne penchée correspond à la première entité musicale, il en résulte un glissando descendant: sol – fa dièse.
La forme de base de ces cinq entités musicales se trouve dans les mesures 4 à 6.
Imaginez que vous exécutiez une rotation de cette représentation graphique autour du centre pour relever ensuite, de nouveau, le rhythme et les hauteurs. Ceci mène aux variations suivantes, mises en oeuvre dans le morceau: 1. Une rotation de 45° (toujours dans le sens des aiguilles d’une montre):



2. une rotation de 315°:



3. une rotation de 210°:



4. une rotation de 280°:



5. une rotation de 245°:



6. une rotation de 80°:

7. une rotation de 115°:



8. une rotation de 150°:



Dans la plupart des cas ces figures musicales sont combinées. Dans la partition on trouve dans les:
mesures 4 à 6 la figure de base
mesures 12 à 14: 1ière rotation, en combinaison avec la figure de base
mesures 20 à 22: 2ième rotation, en combinaison avec la figure de base
mesures 29 à 31: deuxième et troisième rotation, en combinaison avec le premier ton de la figure de base
mesures 37 à 39: quatrième et cinquième rotation, en combinaison avec la figure de base
mesures 40 à 42: sixième et septième rotation, en combinaison avec la figure de base
mesures 61 à 63: septième et huitième rotation, en combinaison avec le premier ton de la figure de base
mesures 97 à 99: figure de base avec des éléments libres pris dans la sixième, cinquième, septième et troisième rotation
mesures 107 à 111: figure de base en combinaison avec le ténor qui est atteint en ce moment.

D’un côté, ce système soulève la question de la bonne mesure valable. Quant aux hauteurs, j’ai arrondi les hauteurs différentes aux quarts; pour indiquer le rhythme, la plus petite mesure est la note 1/32. De l’autre on voit bien qu’il en résulte la possibilité de produire des prolongations ou des transformations en choisissant des mesures différentes, en augmentant ou bien en diminuant. Par là on peut engendrer de multiples variations tout en restant cairement lié à la forme de base.


Exécutions


Première exécution:
le 20 novembre 1990: Hengelbräu à Oldenbourg; → Wilfried Hesse vc

Exécutions suivantes:
le 4 décembre 1994: au Centre culturel PFL à Oldenbourg, → Klaus Marx vc
le 16 août, 1995: au Château Erdödy à Vienne, → Matthias Lorenz vc
le 9 juin 1996: au Ledenhof à Osnabruck, Matthias Lorenz vc
le 14 juin 1996: au Association artistique à Oldenbourg, rép. de le 9 juin 1996
le 16 juin 1996: au Foyer du théâtre à Lingen/Ems, rép. de le 9 juin 1996
le 5 mars 2020: au Théàtre de projet à Dresde, Matthias Lorenz vc
le 7 mars 2020: au Hall d'exposition à Francfort-sur-le-Main, rép. de le 5 mars
le 9 mars 2020: au Association artistique à Oldenbourg, rép. de le 5 mars

Critique


Nordwest-Zeitung du 11 mars 2020 sur le concert du 9 mars 2020

CONCERT À OLDENBOURG
Soirée de violoncelle captivante au Kunstverein
par → Horst Hollmann

Oldenbourg . Un violoncelle atteint une bonne hauteur de 170 centimètres, dard retiré et hauteur mesurée jusqu'à la volute. Comme surface de jeu pure, 70 centimètres de touche et de cordes entre le sillet supérieur et le chevalet suffisent. En résumé : il reste beaucoup d'espace inutilisé pour la production de sons.
Un homme comme Friedemann Schmidt-Mechau a dû voir les choses de la même manière. Et le compositeur, qui vient de fêter ses 65 ans, a agi. Il conçoit ses œuvres pour violoncelle comme des œuvres d'art complètes pour l'instrument, allant jusqu'à la pantomime des postures du musicien. Celui-ci frappe le dard col legno avec le bois de l'archet, caresse le cordier et les chevilles. Le compositeur fête son anniversaire à l'Kunstverein Oldenbourg et avec un public de plus en plus conquis. Le spécialiste de la musique contemporaine Matthias Lorenz de Dresde célèbre quatre œuvres en solo.
Ce n'est qu'à l'âge de 33 ans que Schmidt-Mechau a commencé à composer. Oldenburg, avec l'université, l'ensemble oh-ton et différentes directions de chœur, a été le centre de sa vie avant qu'il ne s'installe en 2014 à Francfort, sa ville natale. Le programme d'Oldenburg, déjà réalisé les jours précédents à Dresde et à Francfort, donne un aperçu informatif de son évolution en tant que compositeur: „Aposiopesis“ de 1990, „Morgenlachen“ de 1997, „Fehlversteck“ de 2007 et „Ent-Gegnung“ de 2019 en première mondiale.
Lorenz révèle „que le compositeur voit d'abord le violoncelle comme un objet avec lequel on peut produire des sons“. Après les cantilènes encore présentes dans la première œuvre, la musique devient de plus en plus dense et aride, souvent aussi plus intime. Les glissandi sont un moyen stylistique particulier de Schmidt-Mechau. Pour le reste, il règne un frottement violent, des glissements, des sifflements, des grésillements, des grincements, des crépitements, des battements, des souffles et parfois même des chants. La diversité semble illimitée, et le violoncelliste en est le brillant metteur en scène et arrangeur.
Le violoncelliste doit mettre son instrument à l'épreuve. Il arrache les cordes et les fait rebondir en pizzicati retentissants. Puis les cordes gémissent lorsqu'il tire l'archet vers le haut, comme une charrue. Et le corpus doit encaisser toutes sortes de claques. Mais il y a aussi du repos. En un seul mouvement, Lorenz reproduit silencieusement et sans harceler l'instrument douze postures qu'un violoncelliste peut adopter en jouant. Peut-on dire que c'est fascinant?
Mais la musique captive inexorablement l'auditeur. Elle se base sur des processus souvent fixés par des séries de chiffres variables. On n'est pas obligé de les comprendre en les écoutant, mais on se doute que chaque exécution apporte des séquences différentes. Sa grande force réside dans le fait qu'elle parvient à rassembler en une unité logique perceptible même les plus petites compositions et les déroulements qui paraissent confus. C'est en effet un morceau de musique nouvelle très fort.